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Mémoires d'un apathique
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24 avril 2008

Alba & Teresa

3ème jour sans regarder par dessus mon épaule.
4ème sans écouter qui que ce soit.
5ème sans manger gras.
6ème sans penser qu'il y a d'énormes trous gris dans mon ventre.
7ème sans penser à Térésa ni à Alba.

Alba est ravissante, les traits fins, ce serait un pécher que de poser mes doigts sales sur sa peau. Alba est une vraie jeune fille, quand on passe l'index autour de sa vulve qui se doit d'être épilée mais pas trop, c'est tout sec. Avec Alba, on ne pense pas à des introductions. De morceaux de soi ou d'autres choses plus consistantes, mais un peu trop fermes, que ce soit du métal ou toute sorte de plastique.
Quand on dit un mot à Alba, il rebondit sur son visage, on a un peu honte, parce que ce n'est jamais le bon mot. Elle vous regarde comme si vous n'étiez qu'un cracheur de mots pas adéquats. Les mots ne restent pas sur sa figure, ils ne glissent pas non plus ; ils tombent comme des mouches, comme si sa peau était couverte de tue-mots. D'ailleurs, sa peau, c'est une vraie perfection, si lisse qu'on se dit qu'elle doit passer quelque chose dessus, crème de jour après crème de nuit. Des crèmes aux pyréthrinoïdes spécialement synthétisées.
Alba, face à elle, on est comme une masse de vide sale, sale dans le sens où le vide deviendrait visible comme une atmosphère chargée en poussières. Qu'elle est belle, Alba, et qu'on est ridicule à agiter ses lèvres molles pleines de minuscules gouttelettes, alors qu'on voudrait lui prouver qu'on est digne ou au moins acceptable pour quelques minutes de rang. Alors on se tait.

Térésa c'est différent. Elle parle avec des yeux si remplis d'humidité qu'on déglutit parce que sinon il faudrait empiler des mots rusés pour lui faire comprendre que moi aussi, je voudrais voir comment elle est faite à l'intérieur ou, même, plus simplement sans ses vêtements. Térésa, elle donne envie de voir jusqu'où on peut enfoncer des objets au fond de sa gorge. Pas des accessoires nécessairement sexuels. Un simple doigt qui irait fouiller et ramener des morceaux de salive, ou ce truc un peu différent et plus collant qui se cache à la base de la langue. Ce qu'on ne fait pas, parce que ça l'empêcherait de parler, et qu'on est pas du genre à interrompre Térésa - ou qui que ce soit d'autre - pour vérifier que sa gorge est autrement plus émouvante que celle d'Alba.
Térésa, elle le dit d'ailleurs qu'on peut la fouiller et constater qu'elle ne ment pas. Mais pas à nous. Je veux dire : c'est pas touche pour les petits garçons qui n'ont même pas le droit de l'explorer. Elle le dit aussi. Elle dit : « je suis un tas à triturer, mais seulement pour ceux qui sont accrédités ». Toi, moi, on n'est pas accrédités. Je ne sais pas d'ailleurs qui l'est. Ou comment il faut faire pour l'être.
Sur le fond, elle est comme Alba, elle tamponne le front de ses interlocuteurs pour savoir la prochaine fois si elle peut montrer un peu de son tas ou pas ou juste raconter que c'est un tas qu'on peut toucher, sucer, pétrir, mâcher, régurgiter, mais pas touche parce que l'étiquetage ne ment pas et qu'en plus c'est elle qui a voté les labels.

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