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Mémoires d'un apathique
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23 février 2008

L'empathie

Il est là à l’écouter parler. Elle se raconte. C’est du moins ce qu’il s’imagine : bénéficier d’une forme de confiance qui lui permet de se poser en confident officieux.  Peut-être que ça n’a rien à voir avec tout cela. Un récit tout ce qu’il y a de plus banal pour elle, des choses qu’elle raconte sinon à n’importe qui, du moins à tous ses proches ou relativement proches. Mais, lui, pense la décrypter, interprète, embellit, conclut, généralise, extrapole. Derrière la façade volontaire, une souffrance diffuse, l’envie banale d’un amoureux, un vrai, pas de la baise sans fond et sans forme. Merveilleux schéma qui se met en place dont on pourrait tirer la conclusion qu’elles sont toutes les mêmes et que sur le fond rien n’a changé depuis un siècle. Lui ne va pas jusque là. Il est happé par l’empathie et ça lui fait mal, cette litanie de mots blessés. Paradoxalement, pas d’archétype ou de clichés ; mais une individualité qui lèche ses plaies.

Il se recule un peu sur sa chaise pour essayer d’échapper  à l'emprise de la douleur, comme si cette distance pouvait donner moins de force à ce qu’elle laisse échapper.

L’empathie. C’est bien. Il se voterait même des félicitations. C’est vrai qu’il trouve son attitude belle et  noble. Mais il sait aussi que le désir est en train de croitre. Frère siamois de l’empathie. Et il ne peut s’empêcher de se trouver un peu faux-cul. Comme un curé qui prêche la bonne parole et la moralité des mœurs alors qu’il saute sa femme de ménage. Ca le fait reculer encore un peu. Mais rien n’y fait : sans même s’en apercevoir, il zoome sur ses lèvres, cette zone si fine juste à la base du cou, ses yeux, ses dents. Le voilà contraint de regarder ailleurs de temps à autre tout en assurant la conversation. Il se sent minable. Et même assez dégueulasse. Le mieux serait de prétexter l’heure tardive pour rentrer et la quitter. Avant que ça ne devienne vraiment pénible. Mais il ne peut pas. C’est le désir qui gagne à la fin.

A un moment, il doit se rapprocher parce que sa voix s’est faite plus faible. A moins que la salle ne soit devenue plus bruyante. C’est à cet instant que la pièce bascule : effet de montage et les voilà tous les deux sur son lit, à elle ou à lui, alors que la salive les recouvre, que ses mains cherche ses seins glissants de sueur et que, dans la lumière anémique, son sexe, son sexe à elle, ressemble à un fabuleux vison blessé.

Ca a duré quoi ? Une seconde ? Moins ? Elle ne s’est aperçue de rien. Du moins, il l’espère. Il sait qu’il devrait partir, mais il en est bien incapable. L’empathie ; de la merde oui ! C’est le désir qui mène la danse. Mais il ne peut s’empêcher de continuer à l’écouter et de s’extasier, de compatir, et, même, de souffrir en écho.  Il se sent à la fois dégueulasse et ridicule. Mais surtout dégueulasse. Et il a compris qu’il ne peut que rester.

La soirée va être longue …

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Commentaires
M
Effectivement la scène seskouelle est entièrement dans la tête. Mais je ne pense pas que Nikita ait mal lu.
G
Well done? Me trompe-je ou Nikita a mal lu et la scène seksouelle se déroule dans dans ton imagination uniquement?<br /> C'est comme ça que je le lis en tout cas.
M
Oui, les dents, c'est fondamental. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est indéniable.<br /> Et, oui (encore), nous sommes d'innommables faux-culs libidineux, mais dans le même temps tellement héroiques. Faut dire ce qui est ...
N
well done, man<br /> <br /> les dents : eh oui, les dents aussi, les dents surtout...<br /> <br /> et ce désir qui fait de nous des bestiaux hypocrites
Mémoires d'un apathique
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