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Mémoires d'un apathique
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1 janvier 2008

J'ai trouvé une traitresse à la cause !

Mes biens chers frères.
Vous êtes brimés. Ou vous vous sentez l'être.
Malgré tous les efforts que vous faites pour vous présenter comme des hommes différents, il y a toujours des donzelles pour vous signifier votre état de queutard impénitent et, partant, votre infériorité ontologique.
Oh, vous en avez fait des tonnes, quitte à en rajouter, à être plus royaliste que le roi. Et pas que pour les tirer, hein. De bonne foi, parce que marre à fin, de se fader les récriminations des anges de perfection (ontologique, elle aussi) qui feraient bien de balayer devant leur porte.
Fa-ti-gués, un peu comme, dans le temps, le prof de fac obligé de porter un bleu de chauffe ou de délirer sur les vertus surhumaines du camarade Staline.
De toute façon, le truc est verrouillé, vous pouvez pas gagner. Parce que vous êtes des mecs, et que donc, pâtissant d'insuffisances notoires, vous ne pouvez que mettre à côté de la cible. Comme de surcroit la majorité des gens écrivant sur le sujet (anthropologues, sociologues, philosophes, essayistes, ...) sont des hommes, inutile de vous fatiguer à essayer d'étayer votre discours. Des agents du grand complot impérialiste, pardon : des vecteurs de la pensée patriarcale.

Il y a tout de même une solution : trouver une femme qui écrit contre ses consoeurs, ne fut-ce que parce que justement elle se considère comme un être humain de sexe féminin et pas comme une militante obligée du fait des hasards de sa naissance.

Alors, si vous voulez rabattre leur caquet à celles encore toutes éblouies d'avoir réussi à tout comprendre à ce gros navet qu'est le Deuxième sexe, pas de problème, j'ai mes sources.

Je viens de dégotter Vagit-prop d'Annie le Brun. Que du bonheur.

Ca commence comme ça : Oscar Wilde m'intéresse plus que n'importe quelle  bourgeoise qui a accepté de se marier et de faire des enfants et qui, un beau jour, se sent brimée dans sa très hypothétique créativité.

Ca déchire son marsouin à la scie circulaire, non ? Le genre de trucs qu'on ose plus dire, par manque de couilles au cul, faut être honnête. Moi le premier. Annie les a bien accrochées, elle, et ne craint de passer pour une sociale-traitresse, voire une gender-traitresse.

De toute façon, c'est une anar et les anars ont toujours raison.

Bon, soyons clair : comme souvent dans ses essais, Le Brun est assez confuse, et n'a pas la rigueur d'un professionnel du concept. Elle a aussi ses marottes (la défense d'André Breton ou un dégout exacerbé envers les néo-staliniennes, par exemple) qui ne clarifient pas des masses son bouquin, c'est le moins qu'on puisse dire. Le vrai problème vient en fait de ce qu'elle n'a pas le sens du pamphlet, et que ses attaques justifiées et peut-être parfois injustifiées tombent souvent à plat.

Mais ça reste une petite mine à citations de bon gout.

Et comme je suis le bon gars, je vous en file deux gratos :

(...) les dames patronnesses avaient leurs pauvres, les féministes de pointe ont leurs putes, leurs folles ou leurs excisées.

Ce mensonge fondamental [le mystère féminin] que jusqu'alors les femmes pouvaient parfois au prix de la plus sombre révolte individuelle, rejeter comme extérieur à elles, voilà que les néo-féministes se font gloire de le reprendre à leur compte, de le revendiquer même comme constitutif de l'identité féminine, avec la frénésie de ceux, qui pour se différencier, s'empressent de se travestir.

Bon, voilà, je vous ai mâché le travail, démerdez-vous maintenant. J'espère juste que je ne vais pas me farcir trop de comms de gros connards nostalgiques du bon vieux temps, façon Houellebecq. Et j'espère aussi qu'Annie Le Brun me pardonnera ces citations un peu longuettes.

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Commentaires
P
Je ne m'assimile à aucune victime, je rappelle seulement qu'en présentant les choses comme tu le fais (sans l'exhaustivité et la minutie d'Annie Le Brun), c'est inutile de prévenir que tu n'as pas l'intention de faire plaisir aux gros beaufs... Vu que c'est de toute façon ce qui va se produire, que tu le veuilles ou non.<br /> <br /> Le féminisme bourgeois me débecte autant que toi mais pas forcément pour les mêmes raisons ; tu te prends les pinceaux à mon avis entre deux points de vue : le féminisme bourgeois critiqué à partir de l'identité humaine (auquel je souscris) et le féminisme bourgois critiqué à partir de l'identité masculine (ce que je trouve estimable a priori mais très ambigu et ambivalent), le dernier apparaissant manifestement, d'après le contenu de ton post, comme ton point de vue puisque tu annonces la couleur dès la première phrase sans équivoque : "Mes bien chers frères. Vous êtes brimés."<br /> <br /> Ne sens-tu pas qu'à l'autovictimisation caractéristique du féminisme bourgeois, tu réponds tout aussi pesamment par une autovictimisation masculine ? Qu'est-ce que tu en as à foutre qu'il existe des connes sexistes ? Ce n'est pas une raison pour leur emboîter le pas.<br /> <br /> Sur les anarchistes : et hop, la messe est dite, les anars ont toujours raison parce qu'ils ont toujours raison. Circulez y a rien à voir. Un jour peut-être tu m'expliqueras, moi la chose ne m'est jamais apparue clairement.
M
Oui, bien sur qu'on peut transposer.<br /> On peut même mettre "Un cochon d'inde m'intéresse plus que n'importe quel hamster ..."<br /> Bon, mais la cible de Lebrun, ce sont ses conseurs, d'où le biais. Sans compter que à tout prendre, les bourgeois qui se sentent brimés, etc, dans une société censemment patriarcale, c'est pas ça (Mais on y vient, c'est beau le progrès).<br /> Sinon, oui, l'intro, c'est l'intro, elle est pas ultra-pertinente, mais est là pour illustrer le coté rentre-dedans de Annie. La dernière est tres bien, certes, mais comme dit dans l'article, elle est souvent confuse, Annie et c'est pas facile d'isoler un bon morceau.
B
Tu veux pas non plus que j'abandonne la mauvaise foi ?<br /> Tot ça pour dire que je trouve pas la première citation tellement significative. Je préfère nettement celle de la fin, qui parle du retour de la transcendance, de cet essentialisme pénible qui fait du préjugé son être.
E
Très percutant, ton argument par transposition, Bobelot ! Et très drôle aussi.<br /> <br /> Mais je me demande s'il est si valide que cela. Après tout, si l'on transpose (homme)/(femme) dans le cas de l'extrait de Memapa, il faut aussi en toute rigueur transposer sur tout le bouquin de Lebrun pour voir si la transposition se tient, et même transposer sur des données qui excèdent de loin le bouquin : le monde tel qu'il est.<br /> <br /> Or, dans le monde tel qu'il est, homme et femme jouent des rôles asymétriques, au moins dans leurs inégalités globales. Donc, est-ce que la transposition, qui ne tient pas compte de cela, est réellement valide ?
B
J'aime bien les études sadiennes d'Annie Lebrun, en particulier les Châteaux de la subversion et Soudain un bloc d'abîme (un titre à éventrer les marsouins aussi). Elle a en plus le mérite de ne pas faire partie de la clique sollersienne qui a fait une OPA sur DAF.<br /> Mais bon, la citation qui ouvre le post, transposée donne quelque chose comme<br /> "Colette m'intéresse plus que n'importe quel bourgeois qui a accepté de devenir cadre, de se marier et de faire des enfants et qui, un beau jour, se sent brimé dans sa très hypothétique créativité"
Mémoires d'un apathique
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