J'ai trouvé une traitresse à la cause !
Mes biens chers frères.
Vous êtes brimés. Ou vous vous sentez l'être.
Malgré tous les efforts que vous faites pour vous présenter comme des hommes différents, il y a toujours des donzelles pour vous signifier votre état de queutard impénitent et, partant, votre infériorité ontologique.
Oh, vous en avez fait des tonnes, quitte à en rajouter, à être plus royaliste que le roi. Et pas que pour les tirer, hein. De bonne foi, parce que marre à fin, de se fader les récriminations des anges de perfection (ontologique, elle aussi) qui feraient bien de balayer devant leur porte.
Fa-ti-gués, un peu comme, dans le temps, le prof de fac obligé de porter un bleu de chauffe ou de délirer sur les vertus surhumaines du camarade Staline.
De toute façon, le truc est verrouillé, vous pouvez pas gagner. Parce que vous êtes des mecs, et que donc, pâtissant d'insuffisances notoires, vous ne pouvez que mettre à côté de la cible. Comme de surcroit la majorité des gens écrivant sur le sujet (anthropologues, sociologues, philosophes, essayistes, ...) sont des hommes, inutile de vous fatiguer à essayer d'étayer votre discours. Des agents du grand complot impérialiste, pardon : des vecteurs de la pensée patriarcale.
Il y a tout de même une solution : trouver une femme qui écrit contre ses consoeurs, ne fut-ce que parce que justement elle se considère comme un être humain de sexe féminin et pas comme une militante obligée du fait des hasards de sa naissance.
Alors, si vous voulez rabattre leur caquet à celles encore toutes éblouies d'avoir réussi à tout comprendre à ce gros navet qu'est le Deuxième sexe, pas de problème, j'ai mes sources.
Je viens de dégotter Vagit-prop d'Annie le Brun. Que du bonheur.
Ca commence comme ça : Oscar Wilde m'intéresse plus que n'importe quelle bourgeoise qui a accepté de se marier et de faire des enfants et qui, un beau jour, se sent brimée dans sa très hypothétique créativité.
Ca déchire son marsouin à la scie circulaire, non ? Le genre de trucs qu'on ose plus dire, par manque de couilles au cul, faut être honnête. Moi le premier. Annie les a bien accrochées, elle, et ne craint de passer pour une sociale-traitresse, voire une gender-traitresse.
De toute façon, c'est une anar et les anars ont toujours raison.
Bon, soyons clair : comme souvent dans ses essais, Le Brun est assez confuse, et n'a pas la rigueur d'un professionnel du concept. Elle a aussi ses marottes (la défense d'André Breton ou un dégout exacerbé envers les néo-staliniennes, par exemple) qui ne clarifient pas des masses son bouquin, c'est le moins qu'on puisse dire. Le vrai problème vient en fait de ce qu'elle n'a pas le sens du pamphlet, et que ses attaques justifiées et peut-être parfois injustifiées tombent souvent à plat.
Mais ça reste une petite mine à citations de bon gout.
Et comme je suis le bon gars, je vous en file deux gratos :
(...) les dames patronnesses avaient leurs pauvres, les féministes de pointe ont leurs putes, leurs folles ou leurs excisées.
Ce mensonge fondamental [le mystère féminin] que jusqu'alors les femmes pouvaient parfois au prix de la plus sombre révolte individuelle, rejeter comme extérieur à elles, voilà que les néo-féministes se font gloire de le reprendre à leur compte, de le revendiquer même comme constitutif de l'identité féminine, avec la frénésie de ceux, qui pour se différencier, s'empressent de se travestir.
Bon, voilà, je vous ai mâché le travail, démerdez-vous maintenant. J'espère juste que je ne vais pas me farcir trop de comms de gros connards nostalgiques du bon vieux temps, façon Houellebecq. Et j'espère aussi qu'Annie Le Brun me pardonnera ces citations un peu longuettes.