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Mémoires d'un apathique
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6 juillet 2007

Bad trip

On avait regardé le Rapport Quiller, film d'espionnage décalé de bout en bout, pas mauvais, mais décalé, bizarre, bourré d'acteurs allemands parlant un anglais parfois approximatif.
Je n'aurais pas du sortir tout de suite.
Après les films étranges ou prenants ou les deux, j'ai beaucoup de mal à revenir dans le vrai monde, j'ai l'impression de flotter, de ne pas être vraiment dans mon corps ni dans mon cerveau, j'ai du mal à accomoder le réel en somme.
Ce peut être une sensation agréable.
Pas cette fois-ci.
Dans un état second et travaillé au corps par une sourde angoisse.
je ne sais pas pourquoi on dit toujours une sourde angoisse. C'est une formule de style à la con. sourde angoisse m'évoque douleur sourde, comme celle d'une dent cariée qui sans cesse emet ses signaux. Quelque chose de diffus et de pas trop désagréable. Un peu désagréable peut-être, mais pas ce qu'on peut appeler une souffrance.
Là, en l'occurence, l'angoisse n'était pas sourde. Elle était même tonitruante, les nerfs plongés dans un robot-mixer avec des bouts d'endonèvre qui giclaient dans tous les coins. L'impression de respirer de la caillasse, les jambes qui ne portent pas, la tête trop lourde qui pique du nez, une monstrueuse sarabande en périphérie de la vision et de l'ouie. Le mieux aurait été de rentrer chez moi et de me mettre sous une couverture en suçotant les jaunes tablettes de lorazépam.
Mais il fallait que je continue. J'avais rencard.
La foule vous écrase dans ces moments là. Il faut se tenir bien au centre, poser des oeillères et avancer pas à pas en trainant avec soi la bulle de contention. L'espace vital portatif sur lequel se fracassent les fragments hallucinés du réel. Un kilomètre et demi dans ces conditions demande une certaine pratique. Mais au final on n'est porté que par le désir impérieux de ne pas s'effondrer au sol en hurlant. On peut en mourir, c'est certain, comme quoi le ridicule tue.
Après c'est le métro bondé, les corps qui collent, les gueules qui claquent à quelques centimètres du visage, les nausées, les caillots durcis qui tamponnent dans les veines.
Au resto, j'adresse un miraculeux sourire aux convives qui m'attendent, et commande illico une bière. Humble liquide qui pourtant apaise la bestiole affolée à l'intérieur. C'est comme pousser un long long soupir. Qui chasse l'air vicié et permet de reprendre - enfin - sa respiration. Deuxième bière. Troisième bière. Tout commence à baigner, je deviens charmant, fait de l'esprit, revient parmi l'humanité sans crainte qu'elle me foute sur la gueule à l'improviste. Délicate ébriété qui remet les organes à leur place, même si le coeur noir, l'organe surnuméraire, continue à pomper ses toxines. Mais à un rythme très lent, presque endormi, qui me permet de prendre le dessus.
On peut dire que vers 23 heures, tout est redevenu normal. Il faudra attendre les heures de sommeil et surtout le réveil pour être certain d'être - provisoirement - libéré de l'emprise du parasite. A moins que ce ne soit qu'une hibernation des plus temporaires et que le cirque ne recommence.

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